"Wednesday" casse tous les records pour son lancement.
Les audiences Netflix du 21 au 27 novembre 2022.
📈 Méthodologie utilisée.
Pays et services concernés : Les 192 pays et territoires dans lesquels Netflix est présent, sur tous les terminaux (TVs, smartphones, tablettes, PC, consoles etc.) comptabilisés de lundi à dimanche dernier.
Mesure utilisée : Millions d’EVC, soit en Équivalents de Visionnages Complets, c’est-à-dire que je divise les heures vues annoncées chaque semaine par Netflix par la durée des films et des séries en question et leur jour de sortie dans la semaine. Je peux ainsi comparer des programmes de taille différente et sans être des audiences à proprement parler, il s’agit d’une équivalence de visionnages des films et de saisons de la première à la dernière seconde. Pour les séries, la mesure en EVC est d’ailleurs équivalente à la mesure du nombre moyen de visionnages par épisode.
Limites : La mesure en heures vues favorise les programmes de longue durée, et/ou ceux qui ont été disponibles le plus longtemps sur une semaine donnée. Le Top 10 ne donne qu’un petit aperçu de ce qui est regardé sur Netflix. Pour en savoir plus sur les limites des mesures d’audience en SVOD, lisez cet article.
Glossaire : W1/W2/W3 : Week 1, Week 2, Week 3 (Semaine).
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🎥 Films.
Les films qui continuent leur exploitation.
Cette semaine, “Slumberland” avec Jason Momoa domine le classement mais reste désespérément dans le middle tier des films Netflix avec 39,4M d’EVCs en 10 jours. “Falling for Christmas” avec Lindsay Lohan continue son parcours insolent en faisant presque jeu égal avec “Enola Holmes 2”. Côté films européens, “A l’Ouest, rien de nouveau” termine ses 28 premiers jours à la 3ème place du classement international et 41,1M d’EVCs. Derrière, c’est plus difficile pour “Balle perdue 2” qui devrait atteindre tout juste les 30 millions d’EVCs au bout de ses 28 premiers jours.
Les nouveaux films.
Thanksgiving ne serait pas Thanksgiving sans sa romance hivernale et c’est “The Noel Diary” avec Justin Hartley qui devait aller au charbon cette année. Avec 21,8 millions d’EVCs en 4 jours, la mission est quasiment réussie mais il y avait de la marge pour faire mieux.
Côté films prestige, “The swimmers” se lance dans la moyenne basse avec 10M d’EVCs en 5 jours. Mais le film n’a pas de stars connues à son casting et c’est aussi un film européen donc le score n’est pas si mauvais du tout. Il est dans ma liste des films à voir d’ailleurs.
La filière polonaise frappe encore avec “Lesson plan” ou “Filière criminelle” en français. Avec 10,5M d’EVCs en 5 jours, il fait un peu mieux que “Furioza” et ses 10,3 millions d’EVCs. Les deux sont des films policiers assez brutaux, donc pas étonné de les voir se lancer dans les mêmes eaux.
Le régional de l’étape de la semaine est “Le patient”, un téléfilm français diffusé sur Arte et sorti sur Netflix avec l’étiquette Netflix Originals partout dans le monde, dont la France (mais sans l’étiquette Original). Avec 5,7M d’EVCs en 3 jours, il se lance à hauteur de “Bac Nord” (qui n’était pas sorti en France cela dit) donc pas mal du tout. On verra son évolution la semaine prochaine.
On termine avec le documentaire de la semaine consacré à Ghislaine Maxwell. On commence d’ailleurs à voir un petit changement de programmation de plus en plus fréquent avec Netflix qui place désormais le vendredi des documentaires tournés vers le public américain. Avec 4,3M d’EVCs en 3 jours, le lancement est honorable et dans la lignée des deux autres dans mon dataset.
Je n’ai pas voulu parler plus en détails mais sachez que le film familial anglais “Noël à la ferme” s’est lancé avec 7,8M d’EVCs en 5 jours tandis que la comédie mexicaine “Couché !” s’est elle lancée avec 2M d’EVCs en 5 jours elle aussi.
📺 Séries.
Les séries qui continuent leur exploitation.
En 2ème semaine, “1899” continue son bon périple. Il est encore un peu tôt pour savoir si elle sera renouvelée mais les chiffres sont plutôt bons. “The Crown” S5 continue de progresser d’excellente façon aussi. Remarquez comme sa courbe est bien plus harmonieuse que celle de la S4A de “Manifest” par exemple (qui continue de placer trois saisons cette semaine dans le classement cependant).
Les nouvelles séries.
Vous vous souvenez quand il y a quelques semaines, je disais que “Dahmer” explosait tout en se lançant avec 22M d’EVCs en 5 jours ? Laissez-moi vous présenter “Wednesday” qui a plus que doublé le score de “Dahmer” en se lançant avec 50,6M d’EVCs en 5 jours. Un score démentiel, quasiment 5 fois plus élevé que la série de Thanksgiving de 2021, à savoir “True Story” avec Kevin Hart.
Je sais ce que vous avez envie de savoir: Peut-elle aller chercher les grands succès du classement de Netflix ? Cela tombe bien, j’ai cherché pour vous et voilà ce qu’on obtient en la comparant à quelques grands succès.
La particularité de “Wednesday” est qu’elle est sortie un mercredi donc, comme “Dahmer”, sa deuxième semaine va être déterminante. Si elle augmente, elle peut largement aller devancer “Stranger Things 4” et finir aux alentours des 120-140M EVCs, ce qui serait un sacré succès. Si sa deuxième semaine est moins bonne, elle pourrait finir aux alentours des 100M d’EVCs, comme les principales séries US de Netflix. Mais “Squid Game” semble trop loin à atteindre du fait de son buzz planétaire à l’époque et que “Wednesday” ne semble pas répliquer (pour l’instant). Le renouvellement pour une S2 minimum semble déjà complètement acquis et elle devrait intégrer le Top 10 US dès la semaine prochaine.
Puisque je parle de “Wednesday”, j’en profite pour rebondir sur un élément de langage de plus en plus présent chez Netflix, à savoir l’utilisation de la mesure en EVC dans leur communication.
La différence entre Netflix et moi est que j’utilise cette mesure simplement comme un moyen de comparer entre eux des programmes de durées différentes qui peuvent sortir un jour différent de la semaine. Mais comme je le rappelle en préambule de chacune de mes newsletters, ce ne sont pas des audiences à proprement parler et jamais il ne me viendrait à l’idée d’accoler “foyers” à un chiffre d’EVC comme le fait Netflix de façon cavalière dans ses communiqués de presse.
Les séries japonaises se font rares sur Netflix. Tellement rare que je ne peux comparer les 0,9M d’EVCs de “First love” avec rien d’autre. Mais ce n’est pas très élevé du tout dans le grand ordre des choses.
Idem pour la série indienne “Khakee” qui se lance avec 1,1M d’EVCs en 3 jours, derrière les 1,9M d’EVCs en 3 jours de “Aranyak”, la seule autre série indienne sortie un vendredi de mon dataset.
😵 Les absents notables.
Pas de gros absents notables cette semaine, sauf peut-être la série documentaire “Notre univers” et la S3 de la série sud-africaine “Blood & Water”.
⏭️ La semaine prochaine, dans Netflix & Chiffres.
La semaine prochaine, on s’intéressera particulièrement à la deuxième semaine de “Wednesday” bien sûr mais aussi au lancement de la S2A de “Firefly Lane”. Côté films, les lancements de “Troll” (candidat potentiel au Top 10 all-time non anglophone), “Lady Chatterley’s lover” (nouveau film prestige de fin d’année) et du film d’animation “Scrooge: A Christmas Carol” (sera-t-il plus “The Sea beast” ou “Wendell & Wild” ?) seront à suivre.
🎥 La sortie de “Glass Onion", Knives Out 2” au ciné aux Etats-Unis.
Pour “Glass Onion”, la suite de “Knives Out”, Netflix avait décidé de faire un changement dans la continuité avec une sortie ciné aux US dans 600 cinémas (comme pour “Army of the dead”) mais des cinémas de chaines plus prestigieuses et surtout un mois avant la disponibilité en streaming du titre sur Netflix. Avec 15M$ prévus en 7 jours, cette sortie est qualifiée de succès par les sites média US mais avec une question lancinante : “Pourquoi Netflix n’a-t-il pas sorti le film dans beaucoup plus de salles, pendant beaucoup plus longtemps pour toucher tout l’argent possible de cette sortie ?”
Sur cette question, comme beaucoup d’autres, il me semble y avoir une certaine incompréhension de la façon dont Netflix fonctionne et qui est pourtant assez simple : l’abonné qui paye est au centre. Avoir plus d’abonnés qui payent est primordial. Les faire payer plus cher sur le long terme aussi.
Or, sortir un film au ciné de façon large aux US avant sa disponibilité en streaming, ce n’est pas mettre l’abonné au centre, surtout à un moment où Netflix doit justifier son prix d’abonnement plus élevé que les autres services auprès de ces mêmes abonnés (sans compter préparer les hausses d’abonnements futures). Enlever une certaine exclusivité à cet abonnement Netflix n’est pas la meilleure façon de convaincre une minorité à rester abonné ou d’en convaincre une minorité de s’abonner ou se réabonner.
C’est avant tout une opération promotionnelle envers les Américains qui ne seraient pas encore abonnés à Netflix, comme le rappelle bien Rick Ellis de la newsletter “Too much TV”.
C’est aussi une opération promotionnelle envers les talents, en leur montrant que Netflix n’est pas fermé à des sorties au ciné, dans une configuration moins confidentielle que d’habitude, dans plusieurs centaines de salles et pendant une semaine évènement.
L’avantage financier d’une sortie large me parait enfin assez peu facile à soutenir. Tout d’abord, Rick Ellis avance qu’une sortie prolongée du film au ciné aurait déclenché des paiements de droits supplémentaires.
Et puis il faut s’interroger sur les gains éventuels d’une telle sortie (ou de sorties larges des 3 à 5 gros films Netflix par an au ciné aux Etats-Unis) pour une entreprise comme Netflix. En 2019, le box-office annuel américain s’élevait à 11 milliards de dollars pour les 910 films sortis en salles. Sur ces 11 milliards, les studios ont touché entre 4 et 6 milliards (entre 40 et 60% selon les accords). Dans le même temps, les abonnements à Netflix aux Etats-Unis et au Canada seulement ont rapporté 10 milliards de dollars. Dans le monde entier, les abonnements ont rapporté 20 milliards de dollars.
Imaginons un instant que Netflix sorte 4 films “importants” dans les salles de cinéma américaines et que ces films rapportent 200 millions de dollars chacun. Sur ces 800 millions de dollars potentiels (la sortie ciné est toujours un risque), 350 millions environ reviendront à Netflix, et ce, sans compter les frais de marketing, de distribution etc. Allez, soyons optimiste, il leur reviendra 250 millions de dollars. Ces 250 millions, c’est l’équivalent de 1,8% de ses revenus aux Etats-Unis sur une année et moins de 1% de ses revenus dans le monde sur une année. Le pari risqué en vaut-il la chandelle ? Pour l’instant, Netflix semble penser que non. Ce week-end, il a sans doute perdu 4-8 millions de dollars mais comme le dit Rick Ellis dans sa dernière newsletter :
The film's brief theatrical run has provided tens of millions of dollar of earned media coverage. And that coverage is only growing thanks to the current discussions about whether the film should have stayed in theaters.
Netflix now has the ultimate buzzworthy original film and in an era where customer acquisition costs in mature markets such as UCAN and Europe are rising steadily, having a reminder to subscribers (and potential subscribers) that Netflix has movies that matter is worth every bit of $100 million to the company.
La sortie ciné n’est jamais assurée, jamais garantie d’être un succès financier. C’est le genre de pari dont n’a pas besoin Netflix alors qu’il amorce un tournant vers la rentabilité.
On se retrouve en fin de semaine pour un nouveau Nielsen Streaming Report !