Netflix fait le plein de films inédits en France pour contourner la chronologie des médias.
Un an après son arrivée en France, le service américain de SVOD compte sur les films américains inédits pour contourner la chronologie des…
Un an après son arrivée en France, le service américain de SVOD compte sur les films américains inédits pour contourner la chronologie des médias et proposer du contenu frais, à la croisée des chemins entre l’offre premium qu’il souhaite devenir et ses origines de vidéoclub en ligne.
On a un peu tendance à l’oublier dans les plaintes que l’on adresse à son catalogue mais Netflix, à la base, est un service de SVOD dont le fond de commerce est de proposer des “vieux” films. Dès ses débuts aux Etats-Unis (et encore maintenant), le service était pensé comme la dernière fenêtre d’exploitation des films, après le ciné, la VOD/DVD, les chaines du câble etc. Son positionnement sur les films “frais” n’est finalement que très récent, poussé par ses séries Netflix Originals qui ont montré l’appétence de ses abonnés pour les contenus maison.
En France, Netflix doit composer avec ces deux extrêmes : sa fonction principale de dernière fenêtre de diffusion des films, confortée par la chronologie des médias française qui stipule que les films de cinéma présents sur la plate-forme doivent être vieux d’au moins 3 ans, et la fonction un peu nouvelle de service premium alimentée par des ajouts de films inédits (et donc pas soumis à la chrono des médias) mais aussi poussée par l’idée (fausse) du public que Netflix propose(ra) les dernières saisons de toutes les séries, les derniers films récents etc.
C’est toute la délicate position du service de SVOD américain en France, qui ne dispose pas encore d’assez de “vieux” films pour être à la hauteur de sa réputation de vidéo-club et dont les ajouts de films inédits confortent le grand public dans cette conception qu’il devrait proposer tous les contenus récents. Dilemme insoluble donc mais difficile de lui reprocher de ne pas tenter de bien faire et de mettre par là-même un bon coup de pied dans le secteur ronronnant de la SVOD française.
Quand le Direct-To-SVOD made in Netflix France met des taquets aux sorties Direct-To-VOD.
Parmi ces coups de pieds, on peut noter les films américains que Netflix va braconner en amont de leur sortie éventuelle en France pour les proposer sur son service. En un an, ce sont ainsi une bonne trentaine de films sortis au ciné ailleurs dans le monde mais encore inédits en France, qui ont ainsi rejoint les rangs du catalogue de Netflix France, comme “The one I love”, “St. Vincent”, “The disappearance of Eleanor Rigby”, “6 years”… et ce, au nez et à la barbe de la chronologie des médias.
Dernier gros coup en date, l’ajout prévu mi-octobre 2015 de “Aloha”, le dernier film de Cameron Crowe avec Rachel McAdams et Bradley Cooper dont la sortie française devait se faire au cinéma en septembre 2015, avant d’être repoussée, annulée, changée en sortie directe en VOD prévue pour janvier 2016 et finalement transformée en sortie directe en SVOD en exclusivité sur Netflix en octobre 2015, un mois donc après sa date prévue de sortie ciné en France.
Ce genre de sorties n’arrive jamais sur Netflix US et pour cause : la fenêtre ciné/VOD y est encore privilégiée même si l’arrivée sur Netflix suit généralement quelques mois plus tard. En France, du fait des coûts et des risques pour un éventuel distributeur français de sortir de tels films américains longtemps après leur sortie initiale, la sortie directe en SVOD sur Netflix peut s’imposer comme une alternative viable pour plusieurs raisons.
Netflix n’a pas caché son envie de devenir un service mondial et d’être présent dans quasiment le monde entier à la fin de l’année 2016. Pour cela, il veut s’appuyer sur des contenus négociés non plus territoire par territoire mais au niveau mondial. Un ajout sur Netflix US d’un film inédit pour la France pourrait ainsi entrainer de facto une sortie directe en SVOD sur Netflix France dans des délais raisonnables, coupant ainsi l’herbe sous le pied au piratage.
La seconde raison est qu’il existe une palanquée de (bons) films encore inédits en France qui attendent qu’un distributeur veuille bien risquer quelques milliers d’euros pour les exploiter ici au ciné ou plus vraisemblablement en DVD/VOD. Avec sa force de frappe financière et son intérêt à disposer des droits mondiaux, Netflix peut s’imposer en amont et rafler bon nombre de films qui de toutes façons ne seraient jamais sortis en France ou bien des mois trop tard.
Enfin, quand Netflix paye des droits pour lesdits films, c’est à un tarif négocié qui sied en théorie aux deux parties impliquées. La VOD est devenue un secteur un peu hasardeux en France, où les recettes sont loin d’être garanties à cause des délais trop longs entre la sortie américaine et celle française, et l’inévitable piratage des œuvres qui en découle. Une sortie directe en DVD coûte également assez chère, dans un secteur dont le chiffre d’affaires diminue de façon régulière depuis des années.
Les différents types de films inédits présents sur Netflix France.
On peut à l’heure actuelle définir différents types de films inédits récents présents sur Netflix France.
Les films Netflix Originals (“Beasts of no nation”, “Tigre & Dragons 2” en 2016…). Ceux-ci seront en exclusivité sur Netflix et au cinéma dans les pays qui permettent ce genre d’”excentricité” en général mal vue par les exploitants de salle. En France, chronologie des médias oblige, ces films sortiront uniquement en SVOD. Netflix met le paquet pour les promouvoir, que ce soit en France ou ailleurs comme pour “Beast of No Nation” pour lequel on parle déjà d’une course aux Oscar.
Les films étrangers dont Netflix achète les droits monde (“6 years”…) Encore assez peu répandus, ces films sortent d’abord au ciné aux Etats-Unis avant d’être ajoutés quelques semaines plus tard sur les différentes variations de Netflix dans le monde entier. Netflix se charge ainsi uniquement de son exploitation dans les pays où le service est implanté. La promo autour de ces films est faible et il faut s’y connaitre un peu pour les déceler et/ou les attendre avec envie.
Les films étrangers dont Netflix achète les droits pour la France uniquement (“St Vincent”, “The disappearance of Eleanor Rigby”, “The teacher”, “Duff”…) Plus nombreux, ces films débarquent sur Netflix sans tambour ni trompettes, et c’est bien dommage parce qu’ils constituent l’un des points les plus attractifs du catalogue de Netflix France en ce qui me concerne, même si les détracteurs parlent de films dont personne ne voulait ici parce pas assez bons. Comme toujours, c’est relatif.
Les films français inédits dont Netflix achète certains droits pour la France et d’autres territoires (“…”). Cette évolution est toute récente, encore assez secrète mais au moins un film français inédit en France débarquera en exclusivité sur le service de SVOD dans les semaines qui viennent. Si Netflix France devient en plus la première fenêtre d’exploitation de films français, on peut s’attendre à deux choses : un gentil remue-ménage dans le monde du ciné français et un développement de petits films inédits qui coûtent peu chers dont les ayants-droits tenteront de vendre à Netflix pour profiter de ses 65 millions d’abonnés dans le monde.
Avec un tel positionnement en France, Netflix fait forcément bouger les lignes établies de la SVOD, considérée jusqu’ici comme la dernière fenêtre de diffusion des films. Le géant américain peut être rassuré, il est fort probable qu’il soit le seul à occuper ce terrain de la SVOD premium, Canalplay n‘ayant ni les moyens de contrer sa force de frappe financière ni l’envie de constituer une menace pour Canal+, son propre service premium de films et séries. Dans tous les cas, Netflix continue de tracer son chemin en France, dans une position finalement bien éloignée de sa maison-mère. C’est ce qui rend son développement et ce qu’il nous prépare dans les semaines et mois à venir très excitant.
Je m’occupe de FilmsdeLover.com, le site dédié aux films d’amour et comédies romantiques et de Direct-to-VOD, le Tumblr des films qui sortent directement en VOD.
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