De l’art (délicat) de référencer l’offre légale française de VOD.
C’est long, difficile et surtout, c’est pas gagné.
C’est long, difficile et surtout, c’est pas gagné.
Une chose compliquée à faire quand on s’occupe d’un site Internet dédié au cinéma, c’est de suivre le calendrier des sorties pour ne manquer aucun film susceptible de nous intéresser. Forcément, avec www.filmsdelover.com, je suis davantage intéressé par les sorties de films romantiques mais entre les sorties au ciné, celles directes en DVD et désormais celles directes en VOD, difficile de garder un oeil partout pour saisir au vol la sortie en catimini de ce petit-film-romantique-que-je-veux-vraiment-voir-depuis-des-mois, surtout en l’absence d’outils fiables.
Cet aspect est d’ailleurs au centre de toutes les attentions pour Aurélie Filippetti qui a réaffirmé dernièrement vouloir déléguer au CNC un appel d’offres pour mettre sur pied un catalogue complet des œuvres disponibles légalement en France en VOD, avant l’arrivée de Netflix et d’Amazon, pour rendre plus visible les offres françaises. Une initiative louable mais qui interroge.
MySkreen et VoirUnFilm, deux annuaires déjà existants.
Parce qu’il existe déjà au moins deux services français qui ont cette fonction. Le premier s’appelle www.myskreen.com et existe depuis 2009 tandis que le second s’appelle www.voirunfilm.com et est soutenu (déjà !) par le CNC.
J’ai pu les tester dernièrement parce que je voulais étudier la disponibilité des films avec Robin Williams disponibles légalement en VOD.
Ce tableau ne fut pas de tout repos à produire pour une raison toute simple : les deux annuaires agissent sur des zones différentes et donnent donc des résultats différents avec beaucoup d’omissions de part et d’autres. Par exemple, MySkreen inclut les services VOD de certaines box dans ses résultats de recherche, ce que ne fait pas VUF (VoirUnFilm). Mais VUF inclut lui les résultats de Canalplay, l’un des plus gros catalogues français de VOD, qui n’apparait pas exhaustivement dans les résultats de MySkreen. De la même façon, les résultats des films disponibles sur MyTF1VOD n’apparaissent pas en totalité sur MySkreen, voire même pas du tout sur VUF. Enfin, les films disponibles en VOD sur Youtube apparaissent sur MySkreen mais pas sur VUF. Bref, l’un comme l’autre ne proposent pas des résultats exhaustifs et fiables.
Dernier exemple en date avec la sortie de “Happy Christmas”, dernier film de Joe Swanberg avec Anna Kendrick et Lena Dunham. J’ai appris sa sortie au détour d’un tweet fortuit avant d’aller étudier cela sur les deux plates-formes de référencement. Pour VUF, le film n’existe pas tandis que chez MySkreen, le film est dispo sur iTunes et VideoFutur, sans mentionner sa disponibilité sur Canalplay. En désespoir de cause, je suis allé voir sur Allociné qui n’annonce lui qu’un laconique “Prochainement” pour sa sortie ciné France. Aucun résultat n’est donc fiable à 100% et voilà la tâche complexe que devra entreprendre la société choisie suite à l’appel d’offres du CNC à la rentrée.
Tâche qui s’annonce très compliquée comme l’explique Eric Walter, secrétaire général de l’HADOPI sur Twitter, à cause des services français de VOD peu enclins à partager leur catalogue.
Le CNC parviendra-t-il faire “plier” les services français et les obliger à partager leur catalogue au sein d’un annuaire simple à utiliser et exhaustif , là où HADOPI a manifestement du mal à mobiliser ? D’ailleurs, comme le fait remarquer Eric Walter, cet annuaire était déjà de la responsabilité du CNC dès 2009 et le vote de la loi HADOPI.
Article 25
I. ― Le Centre national de la cinématographie est chargé d’initier ou d’élaborer, avant le 30 juin 2009, la mise en place d’un portail de référencement destiné à favoriser le développement des offres légales d’œuvres cinématographiques françaises ou européennes.
VUF, Vodkaster et Cinéstore (site d’Allociné), avaient répondu à l’appel d’offres. Cinéstore n’existe plus, Vodkaster est passé à autre chose et il ne reste donc désormais que “VUF” avec les manques évoqués plus haut. 5 ans plus tard, nous revoilà donc au même stade. Une nouvelle fois, le spectateur est prisonnier de ces guerres de clochers entre acteurs du secteur qui feraient bien de s’entendre avant l’arrivée des géants américains.
L’exemple US : Can I stream it ?
Les Américains justement qui bénéficient eux d’un outil qui marche plutôt bien et prend en compte les principaux services de VOD/SVOD tels que Netflix, Amazon, Hulu, Youtube, etc : Can I Stream It ?
Si on cherche “Titanic” par exemple, il suffit de cliquer sur son affiche et on tombe sur une page détaillant où le trouver, à quel prix.
Simple, net et précis, avec la possibilité d’être prévenu par mail si le film sort sur d’autres plates-formes. Pourtant, aussi bien foutu soit-il, ce service pêche encore dans un domaine particulier, celui des sorties VOD sur des services DIY tels que Vimeo on Demand ou VHX. Un exemple avec “Dreamworld”, annoncé comme disponible nulle part et pourtant en location sur Vimeo on Demand.
Les nouvelles formes de distribution des films seront un problème pour ces annuaires de référencement de l’offre légale et il parait difficile pour l’annuaire américain — et a fortiori pour les annuaires français actuels et à venir — d’arriver un jour à mettre sur pied une exhaustivité totale.
A bien y réfléchir, cette impossibilité d’être exhaustif est en soi une chance pour les journaux et blogs ciné de retrouver un rôle prescriptif, d’aller dénicher la perle rare sur telle ou telle plate-forme VOD, plutôt que de se caler uniquement sur les sorties ciné dont tout le monde parle. Le secteur VOD s’apprête à vivre une explosion de l’offre sur différents fronts en contournant celui du ciné, une offre qui sera au final impossible à référencer correctement et exhaustivement. Une nouvelle frontière s’ouvre. Soyons aventureux.
Je m’occupe de FilmsdeLover.com, le site dédié aux films d’amour et comédies romantiques et de Direct-to-VOD, le Tumblr des films qui sortent directement en VOD. Contact : frederic[at]filmsdelover.com